Tout est accompli! Félix Tshisekedi, 61 ans, vient d’être confirmé par la Cour constitutionnelle, avec 73,47 des suffrages exprimés, comme le gagnant de la présidentielle des si longues élections générales du 20 décembre. Il récupère donc, avec une facilité prévue, les clés du palais présidentiel où il a déposé ses pénates, pour la première fois, il y a cinq ans. La victoire du fils de l’opposant historique Etienne Tshisekedi, face à une opposition en rangs dispersés dans une élection à un tour, ne faisait l’ombre d’aucun doute. De plus, le président candidat avait une bonne longueur d’avance sur ses challengers, en ce qui concerne les moyens financiers et matériels.
Ce qui n’est pas rien dans une RD Congo vaste de 2 345 410 km2, et dont certaines régions sont assez difficiles d’accès à cause des voies routières impraticables, parfois inexistantes. Il fallait se déplacer le plus souvent en avion, ce qui n’était pas donné à tous les candidats dont certains ont dû se contenter de campagne électorale à minima. Que dire de ces endroits où l’insécurité est reine et qui sont confrontés aux guerres et aux assauts meurtriers des rebelles du M23 dont le voisin rwandais Paul Kagame est accusé d’être le parrain? Des zones dans lesquelles seul le président sortant a pu s’aventurer dans la pêche aux voix.
Et comme sous les tropiques, quand le président sortant est dans la course pour sa propre succession, le vainqueur de la présidentielle est toujours connu avant le vote même, la RD Congo n’a pas dérogé à cette règle non écrite. Coutumiers du fait, tous savaient que Félix Tshisekedi serait le grand gagnant. Il fallait juste que la formalité se fasse pour que le pouvoir de l’ancien opposant se targue d’être démocratique, comme le dit d’ailleurs son nom. La jauge de la démocratie en Afrique est reconnue étant la tenue d’élections régulières, que celles-ci soient un «simulacre» ou «chaotiques», comme le dénoncent les opposants congolais.
Comme le recours demandant annulation des élections, introduit par Me Théodore Ngoy, le seul candidat malheureux qui faisait encore confiance à la Cour constitutionnelle, les protestations de l’opposition ne rencontrent aucune oreille attentive, ni à la Commission électorale nationale indépendante (Céni), encore moins devant la haute juridiction devant qui, celui qu’elle a refait roi, prêtera serment, en principe, le 20 janvier. Tout est sous contrôle pour Félix Tshisekedi qui aura encore dans les mains, le gouvernail du bateau battant pavillon RD Congo, pour cinq ans, et plus si affinités. Si au moins, comme il l’a promis, l’«ancien-nouveau» président arrive à mettre fin à la guerre et à la rébellion et, surtout, à créer des emplois pour la jeunesse marquée au fer par le chômage endémique et qui ne sait plus à quel saint se vouer, il aura accompli un pas important dans la marche des populations vers le mieux-être.
Mais le chapelet de défis à relever par Félix Tshisekedi est bien long à égrener: instaurer la bonne gouvernance dans un Etat de droit, lutter contre la corruption et les détournements au sommet, restaurer la paix, faire chuter le mercure politique, recoller les morceaux du tissu social en lambeaux, dépolitiser et détribaliser l’administration, redonner vie à une économie anémiée aux mains de l’informel, faire profiter ses compatriotes des fruits du riche sous-sol du pays, se pencher sur les chantiers routiers afin de désenclaver bien des zones inaccessibles, mettre fin aux atteintes aux droits de l’homme et à la liberté d’expression, etc.
Autant de priorités au menu de ce second quinquennat que Félix Tshisekedi mettra un point d’honneur à relever, afin d’essayer de nettoyer les plaies purulentes d’un premier mandat encore sous le feu des critiques. C’est à ce titre que la RD Congo pourra lui pardonner les élections contestées du 20 décembre.
Par Wakat Séra