Dans une tribune parvenue à Wakat Séra ce lundi 5 février 2024, Mamadou Diallo, s’interroge sur la « valeur ajoutée (du retrait du Burkina Faso) à (la) lutte contre l’insurrection djihadiste ».
Quelle valeur ajoutée notre retrait de la CEDEAO apporte-il à notre lutte contre l’insurrection djihadiste ? C’est à mon sens, étant donné la situation tragique que vit notre pays depuis près de 9 ans, la seule et vraie question qu’il convient de se poser.
En effet, les Burkinabè que d’aucuns disent ne plus reconnaître, tant leur passivité politique devant l’imperium du régime militaire du MPSR 2 semble contre-nature.
En vérité, une immense majorité de Burkinabè tous autant qu’ils sont, n’aspirent qu’à une chose : la défaite politique et militaire de l’insurrection djihadiste et le retour à une Paix durable quel que soit le prix à payer pour leurs libertés et leurs conditions de vie.
Alors, j’invite à l’introspection profonde pour qu’un tel sacrifice plus qu’inédit ne soit pas vain.
Comme quelqu’un me l’a fait remarquer, on ne peut mettre la mauvaise foi en équation et la traiter. Alors, il ne faut pas s’en préoccuper, mais nous focaliser chacun, dans la recherche et la mise en commun de solutions à la sortie de la crise sécuritaire.
Alors, je voudrais dans cette perspective, partager le résultat de « ma part de colibri » de réflexions et d’action.
Si l’on peut supputer sans frais sur les conséquences de la décision de retrait de la CEDEAO, elles ne seront effectives que dans un an car je n’ose pas imaginer que les autorités de notre pays puissent pendre l’initiative de ne pas respecter leurs engagements pendant ce délai d’un an, malgré l’annonce d’un retrait « avec effet immédiat » selon le communiqué conjoint. Nous n’y gagnerons rien sauf à compliquer inutilement notre situation.
Alors, nous avons un an pour ne plus nous préoccuper de ce que dira et fera la CEDEAO de notre décision pour une Transition qui nous mette en situation de vaincre politiquement et militairement l’insurrection djihadiste.
Il nous faut dans un premier temps visualiser comment nous voyons une sortie de crise, autrement dit notre victoire contre l’insurrection djihadiste. Pour ma part je retiendrais une image articulée en cinq victoires :
Première victoire : une baisse significative de la violence contre les civils.
Elle sera le résultat d’une lutte crédible et efficace contre l’impunité et la stigmatisation, le résultat de progrès importants dans la reconquête du territoire et le retour sécurisé, dans la dignité et la confiance en l’avenir d’une large majorité de Personnes déplacées internes (PDI).
Deuxième victoire : la mise en route et l’efficacité d’un Dialogue communautaire à la base qui nous permet de définir un profil crédible et viable de la Refondation ancrée dans la vision de nos sociétés villageoises contemporaines et d’engager ainsi, l’affaiblissement organisationnel, militaire et politique des groupes armés djihadistes.
Troisième victoire : la revendication d’une approche endogène de la démocratie fondée sur le profil de la Refondation et ses principales modalités deviennent dominantes dans l’espace public et politique.
Quatrième victoire : les stratégies de lutte contre les groupes armés engagent leur désorganisation, spécifiquement, la neutralisation systématique et régulière des chefs militaires et politiques djihadistes, et plus encore, une démobilisation massive des combattants non acquis au salafisme djihadiste et terroriste.
Cinquième victoire : l’offensive victorieuse et la reconquête complète du territoire.
Comment cela est-il possible dans la situation actuelle des forces en présence ? Deux dynamiques de changement et d’innovation me semblent nécessaires :
- Un changement de stratégie politique et militaire de lutte contre les djihadistes.
Ce changement se traduirait par la mise en place, l’articulation et la mise en synergie d’une composante conventionnelle et d’une composante populaire de la stratégie militaire avec pour axes d’effort conjoint la reconquête du territoire, le retour des PDI et une offre de dialogue communautaire à la base avec les combattants djihadistes dans les différents terroirs villageois.
En ce qui concerne l’offre de dialogue communautaire, son portage, ses acteurs, ses thématiques, ses modalités, ses conditions et les modalités de mise en œuvre de ses décisions devront mettre en confiance de larges pans des combattants djihadistes, ce qui provoquera, à n’en pas douter, un affaiblissement stratégique et politique considérable du JNIM et de l’EIS au Burkina Faso.
- L’espace public et le débat public reprennent leurs droits dans la lutte anti-djihadiste.
Cette dynamique d’ensemble de libération de la parole et des initiatives, devrait permettre d’améliorer de manière significative la gouvernance, le renforcement de l’Etat de droit, une lutte efficace contre l’impunité et la stigmatisation, la multiplication d’initiatives crédibles et diverses en faveur du dialogue, de la paix et de la cohésion nationale.
Avons-nous dans notre pays, des forces sociales suffisamment crédibles et ayant l’autorité morale nécessaire, pour ouvrir une telle voie de manière pacifique et constructive dans un dialogue avec le régime militaire ?
J’ai la faiblesse de le penser et m’en suis expliqué dans ma tribune : https://www.wakatsera.com/sortir-des-coups-detat-et-gagner-la-paix-au-burkina-faso/
Bon courage à nous !
DIALLO Mamadou
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