Non seulement la présence militaire française au Sahel ne sera ni allégée, encore moins arrêtée, dans les prochains mois, mais d’autres opérations majeures seront lancées pour décapiter al-Qaida au Sahel, et ses affidés, en l’occurrence le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans, le GSIM de Iyad Ag Ghali, et la katiba Macina d’Amadou Koufa. L’annonce de Emmanuel Macron, vaut son pesant de plomb, car ce n’est, ni plus, ni moins, qu’une déclaration de guerre contre l’hydre terroriste qui hante le Sahel et menace d’implanter ses tentacules dans tout le golfe de Guinée, à commencer par la Côte d’Ivoire et le Bénin. Mahamadou Issoufou, le président nigérien, qui a loué les victoires engrangées dans la lutte contre le terrorisme dans le Sahel, ne demandait pas mieux que cet engagement de la France à broyer du jihadiste. Il est, du reste, important, pour lui et ses homologues, que Barkhane soit maintenue dans ses positions actuelles au Sahel. Il faut aussi poursuivre, toujours selon le chef de l’Etat du Niger, la montée en puissance des armées nationales, tout en activant celle de la force conjointe du G5 Sahel et souhaiter un renforcement de l’opération Takuba qui doit rassembler davantage de troupes européennes.
En clair, la campagne de salubrité pour débarrasser le Sahel de jihadistes qui l’encombrent et endeuillent, au quotidien, des populations qui ne demandent qu’à vivre en toute quiétude, devrait, visiblement, amorcer un tournant décisif après ce 7è sommet du G5 Sahel, tenu les 15 et 16 février à N’Djaména. Surtout que l’hôte de la rencontre, le maréchal Idriss Deby Itno, bien que confronté à une contestation du 6è mandat présidentiel qu’il veut briguer, projette d’envoyer 1200 soldats tchadiens dans la redoutée zone dite des «Trois frontières», partagée par le Mali, le Burkina Faso et le Niger. Mais plus que les intentions et les lauriers qu’ils se sont tressés, les dirigeants du Sahel, élargis à ceux du reste de l’Afrique de l’ouest, toute la sous-région étant désormais dans le collimateur des jihadistes, doivent bander davantage les muscles. Pas uniquement sur le terrain militaire, mais également sur celui du développement qui doit s’étendre à l’ensemble de leurs pays respectifs.
Certes, les 5 100 soldats de Barkhane restent encore au front, mais pour combien de temps encore? Pas pour l’éternité en tout cas. Il est donc temps que les capacités des armées nationales soient renforcées, tant en logistique qu’en stratégies de guerre. Il est temps que le renseignement soit affiné. Mais il est surtout temps que la bonne gouvernance, pour ne pas dire la gouvernance tout court, devienne la vertu la plus partagée par les dirigeants africains qui sont beaucoup plus obnubilés par le pouvoir et les intérêts personnels et égoïstes qui priment toujours sur celui national. C’est dans la même logique que les 3ès mandats anticonstitutionnels que la France avalise, malheureusement, comme récemment en Côte d’Ivoire et en Guinée, doivent disparaître des mœurs politiques en Afrique. A l’instar du 6è mandat que vise le «grand guerrier» tchadien, ces longs règnes qui s’installent de plus en plus sur le continent, notamment dans les pays francophones, sont de véritables sources de frustrations, de conflits communautaires, d’oppression du peuple, etc., donc de terreau pour le terrorisme. Et ça, il faut le savoir, comme le chante le célèbre reggaemaker ivoirien, Alpha Blondy.
En attendant, contre tous les pronostics allant dans le sens de son départ ou de la réduction de ses effectifs, Barkhane reste bel et bien en place, et son «grand chef», est encore plus déterminé, depuis le palais de l’Elysée, à porter l’estocade au jihadisme en Afrique. Et même s’il se dessine comme un passage de témoin de la France aux Africains, dans un moyen terme, la nouvelle ne peut que réjouir les Africains, car tout départ brusque de Barkhane, laisserait un boulevard aux terroristes assoiffés de sang et de biens des populations en désarroi. Sauf qu’il va falloir accorder les violons, France et ses alliés du Sahel, car certains pays penchent de plus en plus pour l’option de prendre langue avec les terroristes. Au Mali et au Burkina Faso, des communautés locales semblent déjà bien avancées dans cette voie que des dirigeants n’écartent pas non plus. Est-ce la solution, la bonne? Les experts de la lutte contre le terrorisme sauront, sans doute apporter la réponse à cette interrogation qui persiste dans les débats.
Pour l’instant, en tout cas, Barkhane reste pian!*
Par Wakat Séra
*Barkhane reste pian: expression qui signifie littéralement, Barkhane reste bel et bien.