Ce dimanche 21 février était jour de vote au Niger. Près de 7 500 000 Nigériens, en âge de voter, ont été appelés, dans environ 26 000 bureaux de vote sur toute l’étendue du territoire national, pour départager les deux candidats arrivés au second tour de la présidentielle nigérienne, en l’occurrence le président du Parti nigérien pour la démocratie et le socialisme (PNDS-Tarayya), Mohamed Bazoum et le champion du Renouveau démocratique et républicain (RDR Tchanji), Mahamane Ousmane. Dans la capitale, Niamey, et ailleurs dans le pays, selon les informations qui nous sont parvenues, le constat d’ensemble, dans la journée, présente des bureaux de vote où les électeurs ont voté dans le calme et la sécurité. Sauf dans la région de Tillabéri, frontière avec le Mali, où sept membres de la Commission électorale, ont été tués, suite à l’explosion de leur véhicule, qui a roulé sur une mine artisanale, selon nos confrères de France 24 et de l’AFP. Des accusations de fraude de l’opposition, vite réfutées par le parti au pouvoir, et la dénonciation, par la Commission électorale nationale indépendante (CENI), de bulletins de vote frauduleux, «fabriqués dans un pays voisin», et déjà ventilés, ont également marqué cette élection du second tour de la présidentielle au Niger.
A tout seigneur, tout honneur
A tout seigneur tout honneur. Dans cette matinée du 21 février, c’est dans un petit froid d’harmattan, qu’au bureau de vote N°1 de l’hôtel de ville de la capitale nigérienne, Niamey, toute la place a été faite au président de la République, Mahamadou Issoufou, pour glisser en premier, son bulletin dans l’urne. C’était en présence de nombreux représentants de la presse nationale et des médias internationaux, et surtout d’une armada de forces de l’ordre devant qui il fallait montrer patte blanche, avant d’avoir accès au tunnel de désinfection solaire, Covid-19 oblige. «Un grand jour pour le Niger». Les premiers mots de Mahamadou Issoufou, après un vote dont il a salué le déroulement dans le calme, reflète bien la satisfaction des Nigériens engagés dans un processus démocratique cité en exemple sur le continent. L’artisan et témoin de ces moments historiques, qui a décidé de respecter la loi fondamentale de son pays en cédant le fauteuil présidentiel, suite à ses deux quinquennats, se réjouit, évidemment, du bon déroulement de cette élection. Car ailleurs, l’Afrique vit, amèrement, les 3es mandats anticonstitutionnels de l’Ivoirien Alassane Dramane Ouattara, et du Guinéen, Alpha Condé, et s’apprête à vivre le 6è mandat du Tchadien, Idriss Deby Itno. «Le Niger est confronté à des défis immenses, dont ceux sécuritaire, démographique, sanitaire et de développement» dont la résolution passe par la mise en place «d’institutions démocratiques et stables», a alors, rappelé Mahamadou Issoufou.
Mahamadou Issoufou fier des Nigériens
Un processus démocratique auquel le chef de l’Etat s’est «attelé depuis 10 ans» et continue de croire, par l’organisation de ce «scrutin présidentiel transparent et ouvert, comme ceux local et législatifs». Toute chose qui offre cette chance inouïe au Niger, de vivre sa première alternance pacifique qui se manifestera par, «la transmission, pour la première fois, du pouvoir, d’un président démocratiquement élu, à un autre, lui aussi, démocratiquement élu». Ainsi, sera comblé, selon Mahamadou Issoufou, ce manque d’alternance pacifique, dont le Niger a souffert durant des décennies, le pays ayant connu plusieurs coups d’Etat, en 1974, 1996, 1999 et 2010. C’est donc manifestant une fierté certaine à l’endroit du peuple nigérien que, Mahamadou Issoufou, a félicité la Commission électorale nationale indépendante (CENI), cheville ouvrière de l’organisation des élections au Niger.
Mohamed Bazoum, le favori serein, Mahamane Ousmane l’expérience
Après plusieurs semaines passées à l’intérieur du Niger, où il a déposé ses pénates «pour partager le quotidien des populations rurales», ses concitoyens dont il a affirmé avoir recueilli toutes les préoccupations avant d’élaborer son programme de campagne, le candidat Mohamed Bazoum, a exprimé sa satisfaction d’«un vote qui s’est déroulé dans le calme et la discipline». Un calme, qui, selon le président et candidat du Parti nigérien pour la démocratie et le socialisme (PNDS-Tarayya), a prévalu durant la campagne électorale. «Je suis serein» pour la suite, a déclaré, celui qui met Allah avant tout et a appelé «tous, à voter massivement pour renforcer la maturité démocratique de notre pays».
Quant à Mahamane Ousmane, le cheval de Renouveau démocratique et républicain (RDR Tchanji) c’est à Zinder qu’il a accompli son devoir citoyen, histoire de rester à proximité des électeurs de sa région. Une région qui est, du reste, également, celle de Mohamed Bazoum, l’enfant de Tasker. Premier président nigérien démocratiquement élu en 1993, mais tombé par un coup d’Etat en 1996, Mahamane Ousmane, qui était aussi président de l’Assemblée nationale, du 29 décembre 1999 au 21 mai 2009, compte mettre au service du Niger, son expérience d’homme d’Etat.
Ce qui se passait derrière le fleuve
A Harobada, c’est-à-dire «derrière le fleuve» en langue locale djerma, l’ambiance de vote était tout autant à la quiétude. A l’école Kirkissoye 1, où il a fréquenté, jeune scolaire, mais également où il a voté ce dimanche, Boureima Adamou Guidere, a affiché une fierté qu’il partage avec tous les Nigériens. Pour celui qui ne jure que par le PNDS-Tarayya et ses leaders, Mahamadou Issoufou et Mohamed Bazoum, «les Nigériens sauront faire le bon choix et surtout faire confiance aux institutions républicaines et accepter les résultats de ce scrutin pacifique». Mais, s’il y a des contestations, «il faut, une fois de plus demeurer dans l’esprit républicain comme c’est le cas depuis le premier tour», ajoute celui que ses intimes appellent affectueusement «Ibro», qui reste convaincu que «c’est le Niger qui gagne ainsi».
RAS, rien à signaler
Comme Soumana Yaye, le président du bureau de vote 141 de Kirkissoye 1, Abdoulaziz Soumana et Boubacar Mourtala, tous deux délégués du parti d’opposition, RDR-Tchanji, «il n’y a aucun problème, tout se passe dans le calme et la tranquillité». Aissata Amidou et Oumératou Gado, les représentantes du candidat du PNDS-Tarraya dans ce bureau de vote, n’ont pas dit le contraire: «Tous va dans les normes». Le même refrain est repris par la présidente du bureau de vote 146, Aïssa Saïdou qui a même eu le temps de sensibiliser les membres de son bureau et les 100 premiers électeurs qui étaient déjà passés voter, sur les 428 inscrits sur ses fiches. «Vigilance, patience et courtoisie», a conseillé à son monde, Mme Saïdou.
Les électeurs qui n’ont pas leurs cartes d’électeurs, mais présentent leurs cartes d’identité nationales, peuvent voter, si leurs noms figurent sur les listes électorales, rassure ce représentant de la CENI, à l’endroit de certains électeurs, «des cas isolés». Confirmation de Issaka Nomao Nana Aïchatou, observatrice du Wanep, qui essaie de ne rien perdre du déroulement du vote, dans les centres qu’elle parcourt, «sans répit». En tout cas, «qu’Allah protège ce vote, afin que nous n’assistions pas à des scènes de violence et que tout se passe bien», souhaite Aissa Saley, après avoir accompli son devoir de citoyenne.
A Gaweye, dans le quartier de l’opposition
S’ils ont affirmé avoir voté pour le candidat du RDR Tchanji, ces trois jeunes devisant sous un arbre, non loin du bureau de vote 132 de l’école Gaweye 1, ont aussi reconnu que le vote se passe bien, exhibant leurs doigts noircis par l’encre dite indélébile. C’était, du reste, l’avis de la présidente du bureau de vote, Fatoumata Zara.
Tinni Tahirou Maïga, observateur, membre de la Centrale syndicale de la Confédération des travailleurs du Niger (CTN), lui, a relevé que «tous se passe bien». Il a juste souligné qu’à certains endroits, au lieu de constituer la paire par parti politique, «on ne trouve qu’un délégué». Mais, «ça c’est la faute au parti en question», note M. Maïga, qui a conseillé aux présidents des bureaux de vote, de ne laisser aucun électeur pénétrer dans l’isoloir avec un sac ou quelque chose du genre».
Le calme à Karadjé
Au centre Samaria, les bureaux de vote affichaient le même calme. Même si, à l’instar des autres bureaux de vote, celui 064 a ouvert avec un léger retard d’une vingtaine de minutes, tout s’y passe sans accroc. Tout le matériel a été déployé, y compris l’incontournable gel hydro-alcoolique, pour répondre, en plus du port de la bavette, au respect des gestes barrière. «Hamdoulilah (Dieu soit loué), tout baigne», ont affirmé, presque en chœur, Issa Issaka et Bassirou Abdoulaye, les délégués du RDR Tchanji au bureau de vote 064 de Samaria Karadjé. C’est dans ce même bureau que, Moumouni Garba, ingénieur d’aviation civile, option IT (Informatique Télécommunication), venait de voter. «J’ai fait le choix du dirigeant qui va assurer, ma sécurité, ma santé et l’éducation de mes enfants». Pour qui avez-vous voté? «J’espère avoir fait le bon choix, pour ne pas rater cinq années de ma vie», a répliqué, avec le sourire, Moumouni Garba.
La CENI rassure
«Nous avons pris en compte toutes les petits erreurs et les quelques dysfonctionnements qui ont entaché le premier tour», a rassuré le président de la Commission électorale nationale indépendante, Me Souna Issaka. «Nous avons corrigé ces faiblesses, car nous devons avoir un président régulièrement élu», a signifié un président de la CENI, persuadé que son institution fait de son mieux pour répondre aux attentes des électeurs et des partis politiques, qu’ils soient de l’opposition ou du pouvoir.
Tristesse
«C’est avec beaucoup de tristesse que j’ai appris le décès de 7agents électoraux dans la commune de Dargol, suite à l’explosion d’une mine posée par les terroristes qui hantent cette zone. J’exprime ma compassion aux familles des défunts et prie Dieu pour le repos de leurs âmes». Ce sont les mots de Mohamed Bazoum, suite à la mort de sept agents de la commission électorale locale, dans la soirée de ce dimanche de vote. L’ancien ministre de la Sécurité, trouve, ainsi, une raison supplémentaire dans son engagement à «combattre, sans répit le terrorisme et le grand banditisme, qui endeuillent et empêchent les Nigériens de vaquer à leurs activités en toute quiétude».
Par Morin YAMONGBE, envoyé spécial à Niamey