Accueil A la une Sénégal et Côte d’Ivoire: vers les dernières heures de l’armée française?

Sénégal et Côte d’Ivoire: vers les dernières heures de l’armée française?

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Le glas de l'armée française installée dans en Afrique, sous le format actuel est visiblement révolu (Ph. d'illustration)

Les derniers mots des chefs d’Etat en fin d’année sont très attendus, car la plupart du temps, porteurs d’annonces et de décisions fortes pour la vie de la nation. Le rituel a été respecté, un peu partout, alors que s’éteignait 2024. En Côte d’Ivoire et au Sénégal, ce qui n’était plus forcément une grande surprise fut confirmé, par les présidents ivoirien et sénégalais. Alors que Alassane Ouattara annonçait que l’emblématique 43e BIMA, tomberait entre les mains de l’armée ivoirienne dès ce mois de janvier 2025, son homologue, Bassirou Diomaye Faye (BDF) servait la même sauce à l’opinion nationale et internationale, à la différence que ce sont toutes les présences militaires de pays étrangers qui doivent prendre fin, au Sénégal, à partir, de ce mois de janvier. Mais que ce soit à Abidjan ou à Dakar, c’est l’armée française qui fera les frais de ces décisions qui rejoignent, les retraits antérieurs, entourés de frictions, des soldats français, du Mali, du Burkina Faso et du Niger, sans oublier celui en cours au Tchad.

A Abidjan, c’est un véritable mythe qui tombe, avec le départ des 1000 soldats du 43e Bataillon d’infanterie de marine de Port-Bouët et la rétrocession des lieux à l’armée nationale, probablement, sous son nouveau nom de baptême de camp Général Ouattara Thomas d’Aquin, le premier Chef d’état-major général de l’armée ivoirienne. Il faut le dire, sur les berges de la lagune Ebrié, le processus de retrait est loin d’être nouveau, car le moins de présence militaire française avait commencé par la remise à l’armée ivoirienne, du camp de Lomo-Nord, non loin de Yamoussoukro, la capitale politique de la Côte d’Ivoire. Mais, c’est tout de même un symbole qui explose, avec la rétrocession du 43e BIMA, compte tenu des liens étroits séculaires entre Abidjan et Paris.

Alassane Ouattara avait-il vraiment un autre choix? Trop souvent qualifié de «sous-préfet» de la France, le chef de l’Etat ivoirien devait bien poser un acte fort, pour contredire ses détracteurs, et surtout essayer d’éviter, dans le futur, tout caractère conflictuel dans ce dossier brûlant qui pourrait porter un coup très dur, aux relations entre la France et la Côte d’Ivoire. De plus, la Côte d’Ivoire est dans l’attente de la présidentielle prévue pour le mois d’octobre de cette année. Et même s’il a promis que «les élections seront apaisées, transparentes et démocratiques», le président ivoirien, n’a plus toutes les cartes en main. Le cas Tidjane Thiam, le président et candidat du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI), tout comme sa propre candidature non encore déclarée par lui, pourraient bien lui donner, déjà, des nuits blanches.

Au Sénégal «indépendant», Bassirou Diomaye Faye qui s’était présenté comme le candidat de la rupture, et s’assume, aujourd’hui comme un apôtre du panafricanisme de gauche, ne pouvait s’accommoder de «la présence de bases militaires étrangères dans un pays souverain». BDF est donc resté droit dans ses babouches, dans sa logique du changement profond, en évitant de mettre tous les œufs sécuritaires du Sénégal dans le même panier, qui plus est étranger. Et, bien que n’ayant pas appelé «un chat un chat», en citant la France, tous les regards se sont tournés vers les 350 soldats installés à Dakar. Un adage africain aurait dit que tout le monde connaît le nom de la vieille, mais qu’on l’appelle, pourtant, «grand-mère».

Au Tchad où peu d’observateurs l’ont vu venir, le retrait, désormais sous délais, des troupes françaises a été enclenchée et poursuit son cours. En tout cas, les militaires français enkystés en Afrique de l’ouest, et que certains n’hésitent pas à qualifier d’«armée d’occupation», sont de plus en plus indésirables. Difficile de ne pas y voir une résultante directe du sentiment anti-français qui se développe, exacerbée par la percée fulgurante de la Russie de Vladimir Poutine sur le continent noir. Maintenant, que les Africains se donnent l’opportunité de prendre leur destinée en mains, ils n’auront pas droit à l’erreur, car le combat pour l’émancipation vraie a un coût. Surtout que la menace terroriste demeure!

Par Wakat Séra