«Ma décision est de ne pas être candidat, même si la constitution m’en donne le droit.» Et Macky Sall venait de marquer l’unique et beau but dans ce match qui l’opposait à une…opposition qui lui prêtait des intentions d’une 3e candidature. C’est par des touches de balle subtiles dont seuls les politiciens d’expérience ont le secret, que l’attaquant de pointe de l’Alliance pour la République (APR, pouvoir) et de la coalition présidentielle Benno Bokk Yakaar (BBY) a débuté cette rencontre décisive. La partie qui devrait mettre fin à un suspense intenable, était suivie en direct non seulement par les nombreux supporters de Macky Sall, mais également par des téléspectateurs accrochés à l’écran, comme lors d’époustouflante finale de la Coupe d’Afrique des Nations de football 2022, remportée d’ailleurs par les Lions sénégalais face aux Pharaons d’Egypte.
C’est à la 21e minute que Macky Sall tua le match qui aura duré moins d’une heure, avec une première partie disputée en français et une seconde en langue locale wolof. Dans un dribble chaloupé qui aurait fait pâlir de jalousie la flèche des Lions de la Teranga, Sadio Mané, l’enfant de Fatick réveilla les téléspectateurs, adversaires comme supporters du chef de l’Etat, qui commençaient à s’assoupir. Assommés par un cours magistral de dénonciation de la violence meurtrière qui a endeuillé le Sénégal ces derniers temps, depuis les procès qui ont condamné le leader du Parti africain du Sénégal pour le travail, l’éthique et la fraternité (Pastef), Ousmane Sonko, à six mois avec sursis pour diffamation et à deux ans ferme pour corruption de la jeunesse, ils s’attendaient tous à ce que Macky Sall confirme le flirt avec le 3e mandat anticonstitutionnel qui lui était prêté.
Dieureudieuf président! Un merci du fond du cœur qu’ont sans doute servi à Macky Sall les démocrates férus, et tous ceux qui craignaient que le Sénégal se retrouve à feu et à sang, surtout qu’Ousmane Sonko a déjà sonné, la nuit de ce dimanche, la mobilisation pour le «combat final»! Comme à l’accoutumée, ce pour une banale histoire de fesses qu’il refuse d’assumer et dont il en a fait une affaire d’Etat, l’opposant et candidat à la présidentielle de février 2024, a chauffé à blanc la «rue». Pourtant, il est bien conscient du tort fait au Sénégal par ces manifestations qui ne laissent derrière elles, que ruines, désolation et larmes!
Question: quel avenir pour Ousmane Sonko dont l’arrestation était conditionnée par une décision de justice qui est désormais réalité depuis la semaine dernière? Maintenant qu’il n’y a plus de raison de dénoncer un quelconque viol de la constitution, par Macky Sall, pour un 3e mandat, Ousmane Sonko qui a trop longtemps défié la justice et l’Etat, doit maintenant revenir dans l’Etat de droit en se conformant aux normes de la République. Certes, c’est son avenir politique, et en premier, sa candidature à la prochaine présidentielle qui est hypothéqué, vu qu’il sera privé de ses droits civiques, si les jugements restent en l’état. La loi est dure, mais c’est la loi, dont personne n’est d’ailleurs au-dessus!
Le Sénégal qui était suspendu aux lèvres de Macky Sall est-il pour autant délivré des chaînes des démons de la violence qui rôdent autour des urnes, à chaque élection présidentielle? Qui sera le poulain de Macky Sall, qui sauf le fameux «cas de force majeur» avancé sous d’autres cieux, pas trop loin du Sénégal, ne compte pas aller à la reconquête de son fauteuil? Le boulevard est-il désormais ouvert pour l’ancien ministre Karim Wade et l’ancien maire de Dakar, Khalifa Sall, des «bannis» de la République qui devraient revenir dans le jeu politique si les recommandations du «Dialogue national» initié par Macky Sall, reçoivent l’onction positive du président sortant? Autant d’interrogations qui seront scrutées à la loupe avec la nouvelle donne qu’est la non candidature de Macky Sall.
Ce qui est certain, il y a eu, au Sénégal, un avant discours à la nation du 3 juillet et il y aura un après! Car, contrairement aux rumeurs qui lui étaient collées, Macky Sall, à moins d’un rebondissement, ne sera pas candidat pour la présidentielle qui arrive à pas de géant. Cependant, il promet d’assumer la fin de son mandat «avec responsabilité et fermeté». Ces deux derniers mots vont certainement sonner différemment à la Cité Keur Gorgui, qu’ailleurs!
Fin de match…
Par Wakat Séra
