C’est à bout portant que l’ancienne Premier ministre tire sur le chef de l’Etat sénégalais! Déçue par la tournure prise, en sa défaveur, par les événements lors de la désignation de l’occupant du perchoir qui marquait la phase la plus importante de la rentrée parlementaire des 165 députés de la 14è législature au Sénégal, la «Dame de fer» n’y est pas allée de langue morte pour dénoncer le choix de Amadou Mame Diop comme candidat de la coalition présidentielle dans la course à la succession du désormais ancien président de l’Assemblée nationale, Moustapha Niasse.
Pourtant, c’est sûre de son affaire, qu’Aminata Touré, a fait son entrée dans l’hémicycle, tout sourire et d’une sérénité de marbre, à faire pâlir de jalousie un glacier polaire avant changement climatique. Certaine de prendre le contrôle du creuset de la démocratie, là où les représentants du peuple fabriquent les lois et sont sensés défendre les intérêts de la nation entière, cette personnalité politique réputée de caractère bien trempée a vite déchanté. En faisant son entrée dans l’hémicycle qui se transformera par la suite en arène où les élus, qu’ils soient de l’opposition ou du pouvoir se sont mués en gladiateurs, prêts à en découdre, elle était des plus confiantes. Et c’est en toute logique que sa frustration n’a eu d’égal que son optimisme affiché de tenir le maillet de chef des faiseurs de lois.
«J’ai passé ma vie à lutter contre l’injustice, j’en ai subi pas mal dans mon compagnonnage avec Macky Sall, mais là, c’est celle de trop». Cette déclaration chargée de toute l’amertume de celle qui a été chef de liste nationale de la coalition présidentielle Benno Bokk Yakaar, ne sera qu’un grain du chapelet de salves qu’elle a lancées contre le président sénégalais. Macky Sall qui, visiblement, a changé les règles du jeu, en pleine partie. Ce qui n’a pas du tout été du goût de sa coéquipière qui a dénoncé, entre autres, une «injustice qui privilégie les liens familiaux par-dessus le mérite militant». Et pour celle qui s’est sans doute sentie trahie, cette gestion patrimoniale du pouvoir d’Etat, «n’est plus tolérable». La litanie des accusations proférées contre le chef de l’Etat sénégalais par l’aussi ancienne présidente du Conseil économique, social et environnemental, traduisait une indignation sans commune mesure. Et Mimi Touré d’enfoncer le clou dans un entretien accordé à nos confrères sénégalais de L’Observateur: «Un choix injuste, subjectif et beau-familial», assène celle qui n’a occupé que d’importantes fonctions politiques.
Le divorce est-il pour autant consommé entre Benno Bokk Yakaar et celle qui a refusé de voter et donc d’assister au sacre en roue libre d’Amadou Mame Diop, élection sans triomphe marquée du sceau du boycott des 80 élus de l’ensemble des coalitions de l’opposition, en l’occurrence Yewwi Askan Wi et Wallu Sénégal? Pas pour l’instant, car Aminata Touré a remis au goût du jour sa volonté ferme d’assumer son mandat de parlementaire. En attendant la décision de la coalition battant pavillon présidentiel de la garder ou non dans ses rangs, la «Dame de fer» est loin du jet d’éponge suite à cette énième «injustice» qu’elle aura «subie» dans les sillages de Macky Sall.
Question à une assiettée de Thiéboudienne, le plat national de riz et de poisson sénégalais: pourquoi, l’homme fort de Dakar a-t-il changé les plans à la dernière minute? Est-ce pour s’éviter toute surprise au niveau de l’Assemblée nationale dans le dessein caché que lui prêtent ses détracteurs, de vouloir modifier la constitution pour flirter avec le diabolique 3è mandat présidentiel? Est-ce juste pour éviter de s’affubler d’une personnalité trop forte à la tête du parlement et qui lui portera donc ombrage, les mauvaises langues traitant le tout nouveau patron de l’Assemblée nationale «d’élu local sans envergure»?
En tout cas, la barque présidentielle prend de l’eau. Et l’avertissement, pour le moment sans frais pour Macky Sall, pourrait bien constituer les prémices d’une fronde plus conséquente qui couve à Benno Bokk Yakaar. Tout comme tout ceci peut n’être qu’un épiphénomène, un tout petit frémissement du fleuve Sénégal!
Par Wakat Séra