C’est fait, l’alternance a vaincu 10 années de règne APC (All People’s Congress)! Et c’est le champion du SLPP (parti du peuple de Sierra Leone), Julius Maada Bio qui porte l’espoir du changement souhaité par les Sierra Leonais. Mais jusqu’au bout, le match émaillé d’incidents divers, a été serré. Les résultats étriqué de ce mano a mano entre les deux candidats, du premier au second tour, témoignent de la chaude empoignade. 43, 3% contre 42,7% et 51,81 % pour 48, 19%, respectivement pour le gagnant et le perdant Samura Kamara, le cheval de l’APC, désormais ex-parti au pouvoir. C’est dire qu’avec ses contestations pour fraudes, bourrages d’urnes et autres violences, ajoutées à la minceur de l’écart entre les deux challengers, cette élection dont le second round a été reporté de quelques jours est loin d’avoir été un fleuve tranquille. Peut-être même que la suite réserve encore des surprises aux Sierra Léonais et à l’opinion internationale qui, pourtant, poussent déjà un ouf de soulagement, les inquiétudes ayant été grandes que ces élections ne se tiennent pas, compte tenu de la culture des Sierra Léonais plus habitués à la longue série de coups d’Etat qui a émaillée la vie politique du pays. L’enthousiasme des uns et des autres est plus ou moins douché par les déclarations de Samura Kamara qui contestent les chiffres sortis des urnes de Mohamed Conteh, le président de la Commission électorale nationale sierra léonaise.
Pourvu que la machine ne se grippe pas en si bon chemin! C’est tout le mal qu’on peut souhaiter aux Sierra Léonais qui semblent être désormais sous le charme de la démocratie. Certes, le nouveau chef de l’Etat ne porte pas un manteau virginal du démocrate parfait, car ayant déjà goûté aux délices du pouvoir en 1996, par le biais d’un coup d’Etat qui a renversé Valentine Strasser. Mais beaucoup d’eau ayant coulé sous les ponts, amenant les Sierra Léonais à opter de tourner le dos au passé tricoté d’instabilité socio-politique faite de prises de pouvoir violentes et autres conflits réguliers entre ethnies, l’espoir est permis que la Sierra Leone entre dans une nouvelle ère. C’est dans cette logique qu’il faut prendre au mot, le nouveau président élu, dont les premiers mots ont rimé avec unité et union des Sierra Léonais. Surfant sur la forte affluence qui a marqué son élection, soit un taux de participation de 81%, l’ancien officier de l’armée sierra léonaise a martelé qu’il est président pour tous les Sierra Léonais. Il urge donc qu’il rassemble tout son peuple autour de l’intérêt général, misant sur une répartition équitable des richesses d’une Sierra Leone qui, malgré ses mines diamantifères et aurifères, n’a pu jamais se soustraire du cercle vicieux des pays les plus pauvres du monde.
Malgré donc quelques incertitudes qui demeurent encore, nées de la contestation des résultats par le perdant, nonobstant le fait que le nouveau président dispose d’une marge de manœuvre étroite, car n’ayant pas la majorité à l’Assemblée nationale qui reste aux mains de l’opposition, la Sierra Leone peut se réjouir de sa marche peut-être difficile, mais optimiste sur les sentiers de la démocratie. Reste à réussir l’essai de la transition et surtout relever l’économie en lambeaux d’un pays aux ressources naturelles immenses. De Bai à Bio, une page de l’histoire de la Sierra Leone se tourne en tout cas.
Par Wakat Séra