Votera, votera pas? C’est avec cette interrogation lancinante que les électeurs sierra léonais sont allés au lit ce dimanche 25 mars. Ils se relèveront ce lundi, non pas groggy parce que le quotidien se déroule comme normalement, mais sans doute avec la réponse à leur question que le second tour sera reporté. Cette seconde manche qui doit opposer Julius Maada Bio le candidat du Parti du peuple de Sierra Leone (SLPP) de l’opposition, à Samura Kamara, le champion du All People’s Congress (APC), le parti au pouvoir, n’aura certainement pas lieu demain mardi 27 mars, la Haute cour de justice l’ayant ainsi décidé. S’il faut rappeler que le président sortant, Ernest Baï Koroma, ne s’est pas aligné, il faut également faire le constat que, le cheval de l’opposition devance d’une courte tête son challenger du pouvoir, soit 43,3% contre 42,7% des voix. Et comme pour ne rien arranger et laisser planer le suspense sur cette élection désormais en suspens, Kandeh Yumkella, un ancien du SLPP, arrivé en troisième position au premier round du combat électoral, s’est refusé à tout alignement pour l’instant. Avec moins de 7%, l’homme n’a donné aucune consigne de vote à ses militants. Avec donc cette plainte pour fraudes portée par un militant de l’APC qui, on peut le dire vient de mettre un coup de frein momentané au processus électoral, l’attitude du potentiel faiseur de roi, peuvent plonger la Sierra Leone dans des lendemains incertains.
Attention à réveiller les vieux démons de la violence, dans ce pays habitué non aux élections démocratiques, mais plutôt aux guerres civiles. La dernière a duré neuf années et ses séquelles restent encore vivaces dans les esprits. Même si les fameux observateurs internationaux et la société civile, avaient salué presque à l’unanimité, la tenue du premier tour de ce triple vote présidentiel, législatif et local, tout peut arriver. Du reste, les partisans des deux camps se sont livrés à une sorte d’échauffement il y’a quelques jours dans des incidents qui en inquiètent plus d’un Sierra Léonais, et même la communauté internationale, qui craignent des embrasements que pourrait provoquer la moindre étincelle dans un environnement où les nerfs des candidats et électeurs sont à vifs. Des soupçons de manœuvres électorales sont désormais les sujets de discussion les plus prisés. Si certains s’attendent à ce que l’APC œuvre dans tous les sens ne pas perdre le pouvoir, les supporters de la SLPP qui avaient perdu la compétition face à Baï Koroma, sont, eux, persuadés qu’ils ont le vent en poupe et que l’heure est venue pour eux d’être aux affaires. Les tractations et autres deals de bon ou mauvais aloi, dont seuls les politiciens maîtrisent l’art, sont en cours. Dans cette atmosphère où les propositions les plus indécentes font aisément pencher la balance, les troisième et quatrième du premier tour, plus que jamais courtisés, profiteront-ils de de cette mi-temps rallongée pour mieux monnayer les voix de leurs électeurs? Rien n’est moins sûr, les voies de la politique étant insondables.
Toutefois, il importe que candidats et militants, qu’ils soient du pouvoir ou de l’opposition sachent que la seule option importante et salvatrice est seule qui doit les conduire à privilégier l’intérêt général. Car, les politiciens eux ne voient, en général midi qu’à leur porte et sont prêts, à marcher sur des cadavres pour atteindre leur objectif: le pouvoir! Ce serait dommage pour la Sierra Leone de retomber encore dans les travers et les affres d’une quelconque guerre civile alors que le développement de ce pays à l’économie exsangue sonne comme la seule et unique priorité.
Par Wakat Séra