Deux milliards d’euros, sur les quatre dont le plan de riposte de l’ONU a besoin, pour soutenir les populations soudanaises civiles qui sont confrontées à un désastre humanitaire sans précédent. Ce sont des promesses de dons dont a accouchées, ce lundi, la conférence humanitaire qui a rassemblé, sur les bords de la Seine, l’ONU, et des représentants d’une soixantaine d’Etats et d’organisations régionales. «C’est bon, mais c’est pas arrivé», comme le disent les commerçants dans les marchandages qui s’étirent en longueur avec des acheteurs téméraires qui refusent de se faire gruger.
Oui, face à la malnutrition aigue dont souffrent les bébés et les enfants, face à l’insécurité physique dont les femmes sont constamment victimes, face au quotidien extrêmement difficile de pères de familles qui trouvent à peine de quoi faire vivre leurs familles et face à la douleur collective de tout un pays dévasté par les obus et roquettes de deux généraux assoiffés de pouvoir, ces promesses de la communauté internationale pourraient bien se révéler insignifiantes. Déjà que la cagnotte ne constitue que la moitié des besoins.
Pourquoi le Soudan qui connaît les mêmes affres de guerre que l’Ukraine ou la Palestine ne bénéficie-t-il pas de la même attention de la part de la même communauté internationale qui intervient ailleurs en criant au cessez-le-feu? Pourquoi la guerre, qui dure depuis un an au Soudan, est-elle autant oubliée, alors que les attaques de drones lancées par l’Iran contre Israël sont, elles, autant médiatisées et condamnées? Pourquoi une vie soudanaise a-t-elle moins de valeur que celle d’un autre être humain qui tombe lors d’une fusillade ou d’une attaque à l’arme blanche, de l’autre côté de l’Atlantique? Ça fait bizarre, parce que simplement incompréhensible, voire choquant!
Mais c’est ainsi depuis la nuit des temps, tout comme les maladies qui sont au sud et les médicaments au nord. Pourtant, l’Afrique est le continent de l’avenir, ne cessent de clamer ces dirigeants des nations puissantes qui n’ont, en réalité, d’yeux que pour les matières premières et le riche sous-sol africains. Sans pousser le cynisme à son seuil le plus élevé en faisant une classification des vies, il faut tout de même reconnaître que l’Afrique n’a compté que lorsqu’il fallait, en son temps venir y chercher des esclaves utilisés jusqu’à épuisement comme des bêtes de somme ou les «tirailleurs sénégalais» pour constituer la «Force noire» et se battre pour «nos ancêtres les Gaulois». Aujourd’hui, le continent noir compte surtout lors des votes à l’ONU!
En tout cas, il urge de faire cesser la guerre au Soudan, comme ailleurs sur le continent et dans le reste du monde. A quoi servira réellement la mobilisation de grosses sommes, si les armes fabriquées par les mêmes donateurs, vont continuer à décimer le Soudan? Autant, sinon plus que l’argent, il faut mettre en place un mécanisme efficace, pour contraindre les généraux Abdel Fattah al-Burhan et Mohamed Hamdan Dagalo alias Hemedti, et leurs soutiens africains et internationaux, à déposer les armes, afin que prenne fin ce conflit dont les seules véritables victimes sont les populations civiles. Sinon, la mobilisation de fonds ne servira qu’à se donner bonne conscience alors que tombent, comme des mouches, des vies humaines innocentes.
Par Wakat Séra