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Soudan: silence, les généraux tuent toujours!

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Des populations soudanaises fuyant au quotidien le chaos

Depuis avril 2023, le Soudan a replongé dans une guerre dont l’issue n’est visiblement pas pour demain. Les récents combats autour de la ville stratégique d’El Fasher, la capitale de la province du Darfour du nord, ne font qu’enfoncer ce pays dans le chaos et enfler les souffrances de populations civiles dont au moins 150 mille ont été tuées et plus de la douzaine de millions en fuite vers des horizons plus cléments.

Doublée d’une crise humanitaire sans commune mesure, sur fond de famine et d’épidémies, la «guerre des généraux», nourrie par des rivalités internationales, constitue, sans conteste l’une des pires bêtises humaines du 21e siècle, avec l’invasion de l’Ukraine par la Russie, et surtout les tueries en masse dans la bande de Gaza. A la seule différence que la «quatrième guerre civile» est la moins médiatisée, en dehors de quelques jérémiades de l’ONU, vite emportées par les appels constants au calme au Liban et au soutien à Kiev. Comme si la vie du Soudanais a peu, ou prou, de valeur que celle d’un Israélien ou d’un Ukrainien.

Tombée dans un oubli presque total, la guerre au Soudan, prouve, à souhait, que les centres d’intérêt des «puissants» de ce monde, sont les théâtres de conflit sur lesquels se braquent, au quotidien, les projecteurs de l’actualité. Seule la convoitise de son or, dont le pays figure parmi les principaux producteurs, et la course effrénée, engagée par certains pays, pour le contrôle de sa façade maritime, passage important du commerce mondial, offrent, encore, l’opportunité au Soudan de ne pas voir ses populations complètement abandonnées à leur triste sort, par la communauté internationale.

Sinon, l’opinion internationale sait bien que les Forces armées du Soudan (FAS), avec à leur tête le général Abdel Fattah Al-Bourhane, ont pour soutiens, en plus désormais de la Russie, l’Arabie Saoudite, l’Iran et l’Egypte, alors que les Forces de soutien rapide (FSR), les milices paramilitaires du général Mohamed Hamdan Daglo alias Hemetti, comptent sur les armes régulièrement fournies par les Emirats arabes unis (EAU). Les FSR jouissent de cet appui des EAU, elles qui, en son temps, auraient, également, bénéficié, de l’appui indéfectible en armements, et peut-être plus, du groupe russe de mercenaires Wagner. C’est un secret de polichinelle, qu’ailleurs où elle est implantée, ou a été présente, la société de sécurité privée russe, qui était sous les ordres du bouillant Evgueni Prigogine, avant la mort de celui-ci, le 23 août 2023, était attirée par les richesses naturelles de ses hôtes, se faisant souvent payer en lingots d’or.

Qu’est-ce qui rend autant impuissante la communauté internationale, face à cette guerre au Soudan, qui continue de faire des ravages au sein de populations, qui croyaient avoir trouvé le bonheur en chassant l’ancien président de fer, Omar El-Bechir, mais a vu sa révolution être, tout simplement, confisquée par l’armée? Qu’est-ce qui empêche donc l’ONU, de déclencher les mécanismes idoines, afin de priver ces deux généraux, de l’appui de leurs soutiens internationaux? Il faut dire que, jadis, les deux hommes étaient des alliés dans la chute d’Omar El-Bechir, même s’ils sont devenus, aujourd’hui, des ennemis jurés dans la préservation du pouvoir pour l’un, et sa quête pour l’autre. Jusqu’où la communauté internationale ira-t-elle, elle qui se rend, ouvertement, complice de l’enfer sur terre que vivent des populations civiles, elles qui ne demandent pourtant qu’à vivre de l’or de leur sous-sol, dans la paix?

Des questions qui demeurent, en tout cas, pour l’instant, sans réponse. La donne pourrait, peut-être, changer avec le retour de Donald Trump aux affaires aux Etats-Unis, un «come-back» qui, ne manquera pas de rebattre les cartes de la géopolitique mondiale.

En attendant, les généraux soudanais tuent dans le silence.

Par Wakat Séra