Qu’est-ce qui peut encore arrêter le général Mahamat Idriss Deby Itno dans la perpétuation du règne des Deby? Rien, est-on tenté de répondre au vu de l’évolution du calendrier politique qui est sensé déboucher sur des élections ouvertes. Alors qu’elle a pris son second souffle suite au Dialogue national inclusif souverain (DNIS) qui a rassemblé des partis politiques, des organisations de la société civile et des groupes politico-militaires, la marche de la transition tchadienne semble inexorable. La locomotive du dialogue et de la réconciliation, qui a accroché plusieurs wagons, a déjà ramené à la maison, des opposants et des rebelles de renom en exil comme les jumeaux Timan et Tom Erdimi ou Mahamat Nouri.
Le train a même conduit au palais du 15 janvier de N’Djamena, un millier d’adeptes du retour à la paix dans un Tchad où seul le langage de la violence, notamment des guerres civiles est le mieux parlé, depuis les dirigeants qui se sont succédé après le père de la nation indépendante, François Tombalbaye. Les armes n’ont cessé de crépiter, que ce soit du fait des rebellions ou des coups d’Etat qui ont animé la vie politique du Tchad. De Félix Malloum aux Idriss Deby Itno, père et fils, en passant par Goukouni Weddeye et Hissène Habré, pour ne citer que ceux-ci, la coutume du passage sanglant de témoin au palais présidentiel a toujours été respectée.
Le général Mahamat Idriss déby Itno, qui entamera, en principe ce lundi 10 octobre, une nouvelle étape de la transition qui fait suite, à la mort de son père au front, selon la version officielle, en avril 2021, est bien au fait de cette tradition de changement de président dans un concert de kalachnikovs et d’armes lourdes. C’est donc dans l’optique de vaincre ce signe indien que le général Mahamat Idriss Deby, qui s’est installé dans le fauteuil présidentiel la tombe non encore fermée de son père, a mis en branle, avec la facilitation du Qatar, la grosse machine du DNIS. Aussitôt les contempteurs du jeune président par intérim adoubé, en son temps, par le Français Emmanuel Macron, ont assimilé le DNIS à une grosse foire devant juste servir à maintenir la dynastie des Deby.
S’il faut louer l’initiative de Mahamat Idriss Deby Itno de vouloir ramener tous les Tchadiens autour de l’arbre à palabre pour donner une nouvelle chance de paix et de dévolution pacifique du pouvoir, dans le même temps, ce serait difficile de donner tort aux acteurs du boycott du Dialogue qui a pris fin, un jour avant sa…fin. Les Transformateurs, le parti d’opposition dirigé par Succès Masra ou le groupe politico-militaire du Front pour l’alternance et la concorde au Tchad (FACT) de Mahamat Mahdi Ali, s’étaient mis en retrait du grand raout de réconciliation qui, après le retard à l’allumage, a dû marquer le pas pour attendre, en vain, les retardateurs.
En tout cas, tout est accompli et le général Mahamat Idriss Deby, reste bien le chef de la transition tchadienne pour 24 mois encore. Cerise sur le gâteau, le fils du père, a la possibilité et le droit, selon les décisions du DNIS, de se présenter à l’élection présidentielle prévue dans deux ans. Et comme sous les tropiques, la règle non écrite, mais établie et séculaire est de ne pas perdre une élection qui est organisée par soi-même, le Tchad, sauf tsunami est lancé dans l’épisode du film «Déby forever». Question: la guerre sera-t-elle ainsi déclenchée entre la Commission de l’Union africaine, l’organisation continentale dont les principes sur les changements de régimes anticonstitutionnels sont en total déphasage avec le scénario actuel tchadien et la Communauté économique des Etats de l’Afrique centrale (CEEAC) dont la bonté indulgente des chefs de l’Etat est acquise au pouvoir militaire en place?
Tout porte à le croire, avec la première salve tirée par le président de la commission de l’Union africaine, Moussa Faki, à qui certains prêtent des ambitions présidentielles au Tchad, qui a décliné l’invitation à lui faite par les autorités tchadiennes pour prendre part, ce lundi, à l’investiture, du général Mahamat Idriss Déby, comme président de la transition.
Par Wakat Séra