Tout porte à croire que la zone dite des Trois frontières, partagée par le Niger, le Mali et le Burkina Faso, demeurera pour toujours, ou plus ou moins pour longtemps encore, le sanctuaire des hommes armés qui y ont établi leur terrain de chasse où ils ciblent, sans aucun respect pour la vie humaine, hommes, femmes et enfants, civils comme militaires. Des hommes sans foi ni loi, ne vivant que portés par l’adrénaline de la mort, l’odeur du sang chaud de leurs semblables qu’ils tuent pourtant, à la bouche, un slogan évoquant la grandeur de Dieu qui pourtant est amour.
Le Burkina meurtri
Au moins 80 morts, soit 60 civils, 15 soldats et 5 Volontaires pour la défense de la patrie! Des chiffres qui donnent froid dans le dos mais qui sont malheureusement illustratifs de la hargne morbide des terroristes qui ont pris pour cible, ce mercredi, dans la région du Sahel, un convoi de civils escorté par les Forces de défense et de sécurité et les Volontaires pour la défense de la patrie. Dans cette attaque qui vient allonger la liste devenue trop longue des actes terroristes qui endeuillent le Burkina les vaillant soldats ont pu mettre une cinquantaine d’assaillants hors d’état de nuire. Ce n’est pas rien.
Mais à quand la fin de ces tueries qui déciment des familles et des villages entiers, mettant sur la route de l’exil forcé, les populations? Pourtant ces dernières cultivaient leurs champs, faisaient paître leurs animaux et allaient au marché et au travail en toute tranquillité. Mais ça, c’était avant! Depuis cinq ans, les jours se suivent et se ressemblent pour les Burkinabè. Les drapeaux à peine montés au sommet du mât redescendent presqu’aussitôt, mis en berne, pour pleurer de nouveaux morts, civils et/ou militaires, dans des attaques d’individus armés, généralement, jamais identifiés. Cette fois-ci, ce sont 72 heures de deuil. Et demain?
Le Niger et le Mali dans l’œil du cyclone
Oui, à qui le tour demain? Les terroristes n’ont pas attendu longtemps pour répondre à cette question. Ce sont 15 soldats maliens qu’ils ont trucidés et blessé grièvement d’autres, ce jeudi, dans le Centre du pays, dans une de ces embuscades dans lesquelles ils excellent et attirent leurs victimes pour les massacrer lâchement. Au Niger voisin, l’heure n’est pas non plus à la réjouissance. Ce sont deux jours de deuil qui y ont été décrétés par les autorités, pour honorer la mémoire des morts de la dernière attaque dans le village de Darey-Daye, 300 kilomètres au nord de Niamey, dans la région martyre de Tillabéri. 37 civils dont 13 mineurs et quatre femmes, massacrés, ce lundi, par les fameux hommes armés non identifiés. Et c’était en plein jour, pendant que les innocents paysans cultivaient leurs champs. «Ils ont tiré sur tout ce qui bouge», a déclaré, toujours sous le choc et la gorge nouée par la peur, un témoin, preuve que la seule intention ignominieuse des terroristes, était de tuer sans autre forme de procès.
Les civils massacrés
Les paysans, tout comme les autres strates de la population civile, il faut le reconnaître, se sont retrouvés presque sans protection, dans ces régions où les terroristes frappent sans ménagement, les armées nationales subissant en permanence la puissance de feu des assaillants. Ces derniers sont, malheureusement, aidés dans leur sale besogne par le dénuement des forces loyales et le peu ou prou d’efficacité de leurs services de renseignement. Sans oublier que bien des habitants jouent, pour des intérêts bassement financiers ou par peur de représailles, le jeu de terroristes qui, par ces tueries, endeuillent non seulement les populations mais s’accaparent de leurs terres et bétails.
Fuir ou périr
Affamés et sous la menace constante des hommes armés non identifiés, les villageois sont chassés, facilitant ainsi la conquête de nouveaux espaces pour ces terroristes, trafiquants de tout genre qui ont besoin de créer et de sécuriser les voies de leurs deals maffieux de cigarettes, d’or, d’armes, etc. Et les cultivateurs et les éleveurs dont les activités permettent aux citadins de se nourrir, sont contraints de fuir leurs terres, ce qui provoque une flambée des prix sur les différents marchés de produits qui sont maintenant hors de portée pour nombre de citoyens lambda que ce soit au Niger, au Mali ou au Burkina Faso. Toute chose qui a des répercussions d’envergure sur la cherté de la vie.
A quand le bout du tunnel? Les populations peuvent-elles encore compter sur la protection des Forces de défense et de sécurité qui elles-mêmes cherchent à se défendre constamment contre ces forces du mal qui les ont embarquées dans une guerre non conventionnelle? Que devient la force conjointe du G5 Sahel, ce bébé qui peine à se mettre véritablement en mouvement? La Force européenne Takuba a-t-elle réellement pris ses marques alors que celle Barkhane est annoncée sur le départ de ce Sahel où, durant des années, elle a contribué à freiner l’avancée des terroristes? Des interrogations qui demeurent, compte tenu de la facilité déconcertante avec laquelle opère souvent les terroristes.
En tout cas, l’hydre terroriste, malgré les pertes de certains de ses cadres, neutralisés pour la plupart par la Force Barkhane, ne perd pas sa fougue assassine. Il urge pour les Maliens, Nigériens et Burkinabè de s’unir et trouver la stratégie, la bonne, pour aller, à l’assaut de l’ennemi commun. Selon l’adage, «la meilleure défense, c’est l’attaque».
Par Wakat Séra