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Togo: qui l’eût cru?

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Le calme d"avant et pendant élection doit pouvoir continuer à régner selon les Togolais (Ph. wakatsera.com)

Qui l’eût cru? Le Togo étonne sans doute le monde en tournant le dos aux mauvais démons qui ont entretenu le mythe des élections qui rimaient avec violences. Alors qu’ils venaient de vivre un week-end d’élection présidentielle tranquille que bien des observateurs présentaient pourtant comme le scrutin de tous les dangers, les Togolais, chacun dans son secteur d’activité, ont vaqué à leurs occupations de tous les jours.

Maturité politique

Faisant preuve d’une maturité politique bien heureuse, le Togo, pour l’instant en tout cas, constitue un exemple sur le continent. Les politiques, les acteurs de la société civile, et surtout le peuple ont œuvré dans leur ensemble, depuis la campagne électorale à la proclamation des résultats provisoires, en passant par le jour de vote proprement dit. Ce qui fait de ce 22 février 2020, une date mémorable dans l’histoire du Togo politique qui a habitué l’opinion internationale aux après élections bien houleuses. Certes, les populations sont partagées, entre euphorie et espoir pour les partisans de Faure Essozimna Gnassingbé, déclaré vainqueur par la Commission électorale nationale indépendante avec 72,36% et déception et amertume pour le camp en face dont les six candidats sont arrivés loin derrière leur challenger. Mais plus qu’une victoire sur des adversaires sur lesquels il avait plusieurs longueurs d’avance grâce à un «bon bilan» économique qu’il a su défendre durant la campagne, cette réélection doit servir de tremplin à Faure Gnassingbé pour rendre réalité, ses promesses électorales pour le mieux-être des Togolais.

Une victoire exigeante

Les observateurs de la CEDEAO ont apprécié le calme qui a prévalu durant l’élection (Ph. wakatsera.com)

«Cette victoire, si elle est aussi belle, c’est qu’elle est aussi exigeante». Ces propos de Faure Gnassingbé devant ses militants en liesse, doit se traduire dans les faits par l’amélioration des conditions de vie des Togolais, et de tous les Togolais dans un esprit d’inclusion totale. Et cela passe aussi par le respect du jeu démocratique qui n’a pas toujours permis aux opposants de s’exprimer pleinement. C’est ainsi que les observateurs, qu’ils soient de la mission d’observation électorale de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (CEDEAO) dirigée par l’ancien chef de l’Etat de la Sierra Leone, Ernest Bai Koroma, ou de celle de l’Union africaine, qui avait à sa tête, l’ancien président malgache, Hery M. Rajaomarimampianina, ou de la Cen/Sad, ou encore du Wanep, etc., ont salué la détermination du peuple togolais et celle des politiques et organisateurs qui a contribué à une élection ouverte et apaisée. Ils ont alors encouragé tous ces acteurs à maintenir la paix et la sérénité au Togo, «leur» pays jusqu’à la proclamation des résultats définitifs. Du reste, s’il y’a des différends, ce qui ne peut pas manquer, il faut les porter devant les institutions de droit compétentes toujours dans l’intérêt de la consolidation de la démocratie. Si les observateurs ont prodigué diverses recommandations à l’endroit, entre autres, du peuple, des hommes politiques, des acteurs de la société civile et du gouvernement, ils n’ont pas manqué de se prononcer sur des faits dont certains n’ont pas échappé à leurs yeux qui se sont baladés dans les bureaux de vote, de l’ouverture à 7h à la fermeture à 16h, heures locales.

Le défi de la démocratie

Des constats et des recommandations ont été faits par la mission de l’UA (Ph. wakatsera.com)

Mais les observateurs ont vu aussi que les candidats n’ont pas perçu la subvention de 42 millions de francs CFA qui devaient leur permettre de conduire leurs activités de campagne. Ils ont également constaté que le domicile de l’opposant Agbéyomé Kodjo a été encerclé durant quelques heures par les forces de l’ordre. Et ils ont aussi remarqué que l’accréditation n’a pas été accordée au Conseil épiscopal Justice et Paix et que celle de la Concertation nationale de la société civile lui a été retirée, le 17 février 2020. Pour aller jusqu’au bout de la logique démocratique, ces entorses et bien d’autres méritent correction à l’avenir, et les observateurs le mentionneront sans doute dans leurs rapports définitifs. Des premières leçons de cette élection présidentielle du 22 février, il faut dire, tout en reconnaissant que la perfection n’est pas du monde des humains, que malgré ses insuffisances, le scrutin a fait gagner des points au Togo qui n’a pas connu de changement de président mais a connu un changement positif de mentalité d’hommes et de femmes tournés vers le développement dans la stabilité.

Le perdant doit serrer la main au gagnant et tous travailleront pour le bien-être des Togolais (Ph wakatsera.com)

Cependant, ce serait illusoire et suicidaire pour Faure Gnassingbé de penser que toutes les épreuves sont derrière lui, car l’opposition, certes laminée lors de cette élection saura certainement s’organiser pour rebondir, toujours dans cet élan démocratique que les Togolais viennent de prendre.

Par Morin YAMONGBE, Envoyé spécial à Lomé