Les violences à Yirgou ont fait réagir un citoyen « déçu » qui dans cette déclaration, interpelle la Cour pénale internationale (CPI).
Dans la bible il est écrit: il y a un temps pour se taire et il y a un temps pour parler.
Le temps de se taire est révolu.
Oui, face à ce massacre abominable, il est temps que les Burkinabè épris de paix, de justice et de tolérance, puissent dénoncer ce massacre à ciel ouvert et qu’ensemble, on mette les garde-fous nécessaires pour prévenir ces dérives au nom de l’humanité. Personne ne doit tolérer qu’un groupe ethnique soit massacré sur quelque base que ce soit sur cette terre, ni au Burkina, ni au Mali, ni à Timisoara en Roumanie.
Comme lors des autres attaques terroristes, nous nous inclinons devant les victimes de la lâche attaque armée contre le chef de Yirgou et plusieurs de ses proches.
Nous nous inclinons aussi devant les victimes des représailles aveugles qui s’en sont suivies.
C’est contre cette barbarie terroriste que nous devons nous dresser comme un seul homme. En aucun moment, les actes terroristes ne devraient servir de prétexte pour commettre des crimes ethniques de masse.
Qu’importe que les auteurs d’actes terroristes s’appellent Malam Dicko(Ansarul Islam), Boubacar Sawadogo (commanditaires des attaques de Samorogouan en 2015) ou Youssouf Ouédraogo et Abdoulaye Sawadogo (abattus à Rayongo en mai 2018), personne ne devrait se servir de patronymes ou origines apparentes des terroristes pour s’en prendre à toute une communauté d’innocentes personnes. Et le silence des citoyens et surtout des élites ne peut plus se comprendre.
Au nom de quel droit des Koglweogo, des hors la loi, peuvent massacrer des campements entiers d’éleveurs peulhs au seul motif que le chef de village a été tué par des individus qui “auraient”été hébergés par les peulhs (reportage télé BF1)?Malheureusement, les témoignages concordent tous que le nombre dépasse très largement le chiffre de 50 morts.
Le ministre en charge de l’Administration qui avait parlé d’un bilan provisoire de 14 morts, n’a toujours pas mis les pieds sur les lieux du drame, 5 jours après les massacres.
Il a fallu la Voix de l’Amérique (VOA) pour obliger le gouvernement à revoir à la hausse (46 morts) ce bilan macabre qui d’après plusieurs sources est largement plus élevé.
Comme le dit un proverbe peulh, si le premier chiffre est faux, le compte est faux.
Depuis le jour où l’Etat a autorisé que ce groupe de civils portent des armes de guerre pour organiser les battues d’êtres humains et faire tout ce qu’ils veulent, les plus lucides d’entre nous avaient posé la question non pas pour savoir COMMENT le massacre aura lieu, mais QUAND il aura lieu.
Après donc Tialgo ( Centre-Ouest, 6 morts), Karangasso ( Ouest, 4 morts), voilà c’est désormais fait, sous nos yeux: plus de 50 fils du Burkina massacrés parce qu’ils sont peulhs.
Aujourd’hui on a deux choix: on peut continuer à se taire et se dire que les questions ethniques sont de sujets trop sensibles pour en parler et « nous mourons bêtement » comme l’a prédit le Professeur Laurent Bado, ou on est un peu plus courageux, et on met sur la table pour en débattre tous nos problèmes de vivre ensemble dont la question des groupes armés ethniques comme les Koglweogo. Dans une République qui se respecte, des groupes ethniques ne sont pas armés et ne rendent pas justice.
Nous espérons que les aberrations du genre “ils sont là pour attraper les voleurs”, vont cesser pour de bon pour qu’enfin nous puissions retrouver la République pour laquelle nous avons fait l’insurrection les 30 et 31 octobre. Que l’ordre soit maintenu par les seules forces républicaines et non par des groupes ethniques.
Jusque-là, il nous semble que personne n’a été interpellé à Yirgou. L’opinion publique et les parents de ceux qui ont été assassinés demandent aux autorités que justice soit faite. Et si on en est incapable, sachons que ce genre de crime est aussi du ressort de la CPI. Nous interpellons la Cour Pénale Internationale de nous aider, si nous en sommes incapables en tant qu’Etat.
Pour moins que ça, nous avons décrété un deuil national. La question est maintenant de savoir si l’Etat, qui traîne les pas pour donner un bilan fiable, va organiser un deuil national pour ces dizaines de personnes massacrées, juste parce qu’ils sont nés peulhs.
Et finalement, le gouvernement doit une fois pour toute, nous dire s’il est okay que des Koglweogo puissent continuer à avoir droit de vie ou de mort sur des citoyens paisibles. Des rackets, des actes de tortures, des expéditions punitives et maintenant des massacres……
Cette impunité n’a que trop duré.
Amed Moussa DIALLO
Un Burkinabè déçu