Pneus brûlés sur les chaussées. Station-service, banque, boutiques, et autres bâtiments incendiés, ou vandalisés et pillés. Des blessés, et, malheureusement, deux morts, dont le garde de corps de l’ancien Premier ministre, Oumarou Seini. Depuis mardi, au moins 468 personnes, ont été interpellées, parmi elles, le général à la retraite Moumouni Boureima dit «Tchanga», ancien chef d’état-major du défunt président, Mamadou Tandja. Les interpellés, en tout cas ceux dont l’implication dans les actes incriminés sera reconnue, seront poursuivis en justice, selon le procureur de la République. L’une des dernières victimes en date, n’est autre que Moussa Kaka, correspondant de Rfi au Niger, ciblé sous sa casquette de journaliste. Son domicile a fait les frais de ces manifestants en furie, laissant derrière eux, cendres et désolation.
Pourtant, notre confrère, dans l’exaltant exercice de couverture médiatique de ces élections, présidentielle et législatives couplées du 27 décembre 2020, notamment du second tour de la présidentielle, le 21 février, s’est distingué, par des comptes rendus fidèles, et d’une impartialité reconnue. Une fois de plus donc, les prédateurs de la démocratie et surtout de la liberté d’expression, se sont illustrés, comme à l’accoutumée, de la pire des manières. Ces terroristes d’une autre espèce, auraient voulu chercher à museler la presse, qu’ils ne s’y seraient pas pris autrement. Le droit à l’information des populations sera-t-elle, un jour réalité? Il est permis d’en douter, quand des individus sans foi ni loi, comme ceux qui s’en sont pris au «sympathique» Moussa, oeuvrent pour sa disparition. Mais l’espoir est également permis, car, grâce aux journalistes, souvent au prix de leur vie, comme le Burkinabè Norbert Zongo et les Français Ghislaine Dupont et Claude Verlon, le premier assassiné le 13 décembre 1998 et les deux autres tombés dans le sable chaud de Kidal au Mali, le 2 novembre 2013.
Les démons de la violence sont donc de retour au Niger. Ils se sont emparés de manifestants en transe, se réclamant d’une partie de l’opposition qui elle-même revendique une victoire qui lui aurait été volée lors du second tour de la présidentielle nigérienne. Les résultats provisoires de ce second round, livrés par la Commission électorale nationale indépendante (CENI), accréditent l’opposant Mahamane Ousmane, le perdant, de 44,25%, et donnent vainqueur, Mohamed Bazoum, le président et candidat du Parti nigérien pour la démocratie et le socialisme (PNDS-Tarayya), avec 55,75% des suffrages exprimés. Criant à la fraude, pendant et après la publication de ces chiffres, qui, pourtant, ne sont que provisoires, et se proclamant gagnant de cette joute électorale avec 50,3%, Mahamane Ousmane, le cheval du Renouveau démocratique républicain, le RDR Tchanji, aurait dû prononcer, tout au moins un discours, qui aurait pu contribué à ramener le calme dans un pays, déjà dans l’œil du cyclone jihadiste. Le nouveau président de la République, Mohamed Bazoum, en lui tendant la main, pour travailler, tous ensemble, pour un Niger qui gagne dans la paix, a pourtant loué la sagesse de celui qui, dans une ancienne vie, a été président de la République.
Puisqu’il a promis utiliser tous les moyens légaux pour défendre cette victoire qu’il revendique, tout geste d’apaisement de sa part, serait le bienvenu pour éviter au Niger, ce spectacle désolant, alors que le monde entier salue la maturité d’un peuple qui a voté dans le calme et attend de son président élu, qu’il leur apporte sécurité et développement. Une quiétude et un mieux-être qui demeureront chimères, tant que des politiciens sans foi ni loi, jetteront dans la rue, pour l’assouvissement de leurs intérêts égoïstes et très personnels, des manifestants qui sèment la terreur et le deuil. Et une fois de plus, c’est la presse qui en pâtit, c’est le tissu social qui va en lambeaux entiers!
Il est temps que force reste à la loi, pour la protection des populations et de leurs biens. Et que les auteurs de ces violences soient punis à la hauteur de leurs forfaits. Aucune contestation, aussi juste soit-elle, ne saurait justifier les atteintes aux libertés des personnes et de l’expression. Trop c’est trop!
Par Wakat Séra