Le feu couve au Zimbabwe comme au Gabon où des scrutins, une fois de plus contestés pourraient bien provoquer l’explosion de la marmite sociale. Comme s’ils se sont passés le mot, Zimbabwéens et Gabonais ont organisé des triples scrutins, une présidentielle, des législatives et des sénatoriales pour les premiers et une présidentielle, des législatives et des locales pour les seconds.
Au Zimbabwe comme si les membres de la structure en charge des élections avaient le feu aux fesses les résultats ont été proclamés à une vitesse grand V, donnant vainqueur, avec 52,6% des voix, le président sortant, Emmerson Mnangagwa, bientôt 81 ans, et perdant, avec 44% son challenger, l’opposant Nelson Chamisa, 45 ans. Pour les législatives, le schéma n’est guère différent. Alors que l’historique Zanu-PF (pouvoir) s’en sort avec 136 sièges sur 210, le parti d’opposition le MDC, s’en tire, selon les chiffres officiels, avec juste 73 élus. Comme dans un choc générationnel où la part du lion doit toujours revenir à l’aîné, le «crocodile» rafle tout, comme en 2018, où il s’est donné une virginité par les urnes, après avoir remplacé Robert Mugabé, le «vieux Bob», renversé par un coup d’Etat. Mais comme il y a cinq ans aussi, le jeune avocat, pasteur chrétien évangélique pentecôtiste n’entend pas se laisser «voler sa victoire».
Comme en 2018, les Zimbabwéens vont-ils encore vivre des manifestations violemment réprimées et meurtrières? Rien que la proclamation des résultats fut endeuillée, en son temps, par six pertes en vies humaines. Bis repetita, diront alors les analystes politiques, eux qui savent comme tous, que les mêmes causes produisent toujours les mêmes effets! Tous les ingrédients sont réunis pour faire de ces élections générales des 23 et 24 août, contestées, une source de tempête socio-politique qui secouera une fois de plus le Zimbabwe. Fraudes, intimidations et autres entraves, sont dénoncées par l’opposition, tandis que l’ONG Human Rights Watch dénonce un «processus électoral gravement défectueux et que la communauté de développement d’Afrique australe qualifie des «aspects du scrutin non conformes».
Au Gabon, les populations retiennent leur souffle, à cause des mêmes élections générales. En attendant la fumée blanche qui doit sortir de la cheminée du Centre gabonais des élections, le pays est plongé dans l’incertitude du lendemain. Couvre-feu, coupure de l’internet, suspension de médias internationaux notamment RFI, France 24 et TV5 Monde, accompagnent des mesures dites de maintien d’ordre qui ressemblent plutôt à un musellement, pour faire monter le mercure socio-politique. Les scrutins du samedi 26 août, comme celles de 2016 qui ont provoqué une grosse crise post-électorale sont déjà pris à partie par l’opposition qui dès le jour de vote, a évoqué un «coup d’Etat électoral en cours au Gabon». Les griefs contre le pouvoir du champion du Parti démocratique gabonais (PDG) du président Ali Bongo Ondimba (ABO), candidat pour la troisième fois, à sa propre succession, sont légion. Florilège: absence de bulletins du candidat adverse dans plusieurs bureaux de vote, des centres de vote fermés dans plusieurs localités, des bourrages d’urnes déjà scellées, le tripatouillage du fichier électoral, etc.
En tout cas, à Libreville comme à Lambaréné ou à Oyem, le spectre de 2016 rôde, poussant les Gabonais à faire des provisions et à se terrer chez eux, par peur des violences qui pourraient accompagner la phase cruciale de l’annonce des résultats de ces élections de tous les dangers. L’opposition, réunie sous la bannière d’alternance 2023 et qui a misé, fait rare en Afrique, sur un seul cheval, en l’occurrence Albert Ondo Ossa, est déterminée à ne pas perdre une fois de plus, après l’épisode Jean Ping. L’éminent économiste de 69 ans, et ancien ministre d’Omar Bongo Ondimba, père du fils, revendique déjà la victoire pour la présidentielle de samedi, criant à la fraude. Il demande même à Ali Bongo Ondimba de venir négocier sa sortie! La crise, à moins que les candidats et leurs partisans mettent balle à terre, ce sont les nuages sombres d’une nouvelle crise socio-politique qui s’amassent au-dessus des Gabonais!
A quand donc la fin des vraies fausses élections et autres simulacres de démocratie en Afrique? Il est grand temps pour le continent noir et ses politiciens de tous bords de vaincre le signe indien des élections de la guerre et de la mort!
Par Wakat Séra